Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Nouvelles d'Allemagne

25 mars 2012

Minijobs (3)

Minijobs (suite)

 

En bref, aujourd'hui , les conséquences de la politique lancée par Gerhard Schroeder et la sociale démocratie (Hartz IV, minijobs,...) sont doubles:

- les riches sont de plus en plus riches

- les pauvres sont de plus en plus pauvres!!!

Et, les classes moyennes inférieures (jusqu`à 130% du salaire moyen) connaissent depuis dix ans une érosion sans précédent: chaque année 500 000 personnes n'en font plus partie. Dix pour cent améliorent leur situation financière et 90 pour cent rejoignent les déshérités, qui sont actuellement environ 10 millions, avec toutes les conséquences que cela peut avoir en matière de santé, d'éducation et d'économie générale! Toutes les conséquences que cela aura aussi dans l'avenir!

L'écart entre les riches et les pauvres n'a jamais été aussi grand et il est seulement comparable dans les pays occidentaux à ce qu'il est en Roumanie et en Bulgarie!

C'est ce modèle qu'on fête un peu légèrement en France!

Bien entendu, tout n'est pas à rejeter, mais il est regrettable qu'on ait fait exclusivement porter le chapeau aux défavorisés. L'aide sociale (sous quelque forme qu'elle soit) est chichement distribuée. Des inspecteurs contrôlent le "train de vie" des "bénéficiaires": type de voiture, utilisation, sorties, le contenu des poubelles même est parfois inspecté!!!! Il y a peu de temps encore, il ne fallait strictement rien posséder (ni voiture, ni appartement, ni compte épargne) pour y avoir droit! Aujourd'hui, on admet une "propriété" correspondant à 700 euros par personne et par année de travail! Le surplus minore l'aide perçue!

Pays de dumping social, l'Allemagne ne peut servir sans corrections de modèle:

- Mépris du chômeur (Hitler avait inventé, pour les embrigader dans des travaux forcés - la catégorie des "Arbeitsscheuen" = le frileux du travail)

- Salaires parfois extrêmement bas et retraites dérisoires quand on n'a pas eu la chance d'appartenir au secteur public

- Politique de santé injuste et restrictive

- Education sélective avec une part croissante du privé et des formations par les entreprises

- Pas encore de salaire minimal...

 

L'Allemagne peut effectivement être un  paradis: pour les 5% de riches bien entendu, mais aussi - dans une proportion moindre -  pour les travailleurs qualifiés, les petits et moyens entrepreneurs, les professions libérales, les fonctionnaires..., mais pour les chômeurs, les employés de base du secteur privé peu ou pas qualifiés, les personnes cumulant les minijobs et/ou  les emplois temporaires, les retraités au parcours de vie difficile..., ce n'est certainement pas le cas.

La différence avec la France, c'est probablement le vieux fond culturel, l'empreinte protestante (même chez les catholiques) qui fait accepter avec une dignité de façade sa pauvreté: on a honte de se révéler misérable et on le cache donc le mieux possible. Et puis les habitudes des générations précédentes font merveille: on est assez "frugal" dans ses besoins en Allemagne surtout quand on est pauvre: on se nourrit par exemple comme l'on fait les générations passées:  un repas chaud le midi (beaucoup moins de viande qu'en France - ce qui n'est pas un mal), une tranche de pain-cornichon- moutarde et charcuterie le soir. Personne n'y trouve á redire. cela fait partie des habitudes! Pour les loisirs, il y a la télé.

Publicité
Publicité
21 mars 2012

Minijobs en Allemagne (suite)

La majorité de ces petits boulots sont occupés par des gens qui gagnent trop peu pour vivre correctement dans leur activité principale (il y a quelque temps, les coiffeuses à 3-4 euros de l'heure ont défrayé la chronique!),  mais aussi par des retraités. Il faut savoir que, mis à part les fonctionnaires (retraite quasiment à 100% d'un salaire généralement très correct sous condition d'âge et de 35 années de cotisation - les années d'études prises en grande partie en compte!), les "employés" ne touchent que des retraites nettes souvent médiocres et il y a tous ceux qui, pour une raison ou une autre, sont mis en retraite anticipée. Ces jobs qui rapportent 400 euros leur sont donc permis (pas de charges pour les patrons, pas de cotisations pour les "travailleurs") mais tout ce qui dépasse ce montant est en revanche pratiquement défalqué de la retraite! Il n'y a donc pas intérêt à dépasser ce chiffre.

La coalition au pouvoir vient cependant d'envisager de supprimer cette limite et de permettre à tout retraité avant l'âge légal (67 ans très bientôt) de pouvoir exercer une seconde activité (normalement imposée avec la retraite) qui leur permettrait de gagner autant que ce qu'ils avaient au maximum au cours des 15 dernières années d'activité. Condition: avoir au moins 63 ans et travaillé 35 ans. Le gouvernement semble s'être rendu compte que de nombreux travailleurs ne pourront atteindre les 67 ans dans leur premier emploi et qu'en raison de leurs faibles revenus, ils devront compter sur la "retraite complémentaire" versée par l'État permettant d'arriver à 850 euros par mois. La possibilité de travailler pour plus de 400 euros rendrait moindre le coût de cette retraite complémentaire!

On peut toutefois se demander ce qu'apportera une telle "réforme" á quelqu'un obligé de partir en retraite anticipée pour des raisons de santé et qui, à l'évidence, ne pourra entamer une seconde carrière...

Remarque: en Allemagne, il n'existe pas (encore) de retraite minimale. La retraite dépend de ce qui a été cotisé au cours de la vie professionnelle.

Il existe une "Grundsicherung" (Hartz IV) sorte de RMI : le montant moyen est de 710 euros (2011) soit : 347 euro par adulte plus les frais de logement (strictement mesuré) et de chauffage (l'électricité est à la charge exclusive des personnes)... Tout est fait pour que même les plus pauvres s'efforcent de cotiser à une retraite privée ou semi privée personnelle...

19 mars 2012

Travailler en Allemagne: les fameux mini jobs

Au cours du dernier trimestre de 2011, le nombre des minijobber a encore augmenté. Au 31 décembre la Centrale de recensement de ces "jobs" signalait un total supérieur à 7,1 millions, soit 1,2% de plus qu'une année auparavant. Les secteurs d'activité qui y ont le plus recours sont le petit commerce (près d'un million) et la restzauration (près de 700 000). 1/4 de million de minijobs sont consacré aux diverses aides ménagères (personnes âgées, ménage...).

 Il est à noter que les deux tiers de ces "emplois" sont occupés par des femmes (92% en ce qui concerne les aides ménagères). L'Allemagne compte environ 42 millions de travailleurs: 1/6e sont des minijobs dont le salaire moyen est de 265, 08 euros (à l'Ouest) et 215,6 (à l'Est).

Deux remarques:

1.La majorité de ceux qui ont recours à ces petits boulots  n'y voient que le moyen de se faire un peu d'argent de poche en plus d'une autre activité.

2. Ce type de travail ne doit pas être confondu avec le travail temporaire (en forte augmentation).

On peut consulter: www.minijob-zentrale.de

19 février 2012

Le match France Allemagne

Le match France-Allemagne se continue: faut-il ou ne faut-il pas imiter "les Allemands"? Ont-ils trouvé la panacée pour sortir de la crise? Les experts s'affrontent, chiffres en mains. Chacun en sait davantage que l'autre... 

Moi, qui ne suis expert en rien mais qui habite l'Allemagne depuis des années, je suis sorti hier soir samedi. J'ai mangé dans un petit bistrot à l'ambiance sympa une excellente et somptueuse salade composée (bio!) arrosée d'un verre de vin: 7,5 euros. Puis, je suis allé au Cinéma communal, une salle à l'ancienne mais confortable, un peu comme les salles arts et essais de ma jeunesse. J'ai vu Melancholia de Lars von Trier : 3 euros le ticket. Difficile à trouver en France.

Quand je vais à Berlin et que je m'installe sur telle immense terrasse du Kurfürstendamm, face à l'église du souvenir, ma boisson me revient à 2,6 euros; à Paris, un perrier boulevard Saint-Germain me coûte 6 euros! La même pizza vaut à 5 euros en Allemagne, au moins dix en France et si je bois autre chose que l'eau en carafe, le "différentiel" s'accroît encore... Je pourrais multiplier les exemples: il est évident qu'on vit meilleur marché en Allemagne qu'en France et il n'y a pas que les loyers ou les portables: on a même intérêt à acheter les produits français (du camembert aux voitures peugeot ou renault) à l'est du Rhin!

Cela vient sans doute du fait qu'ici on a davantage le sens des prix justes (?), de ce qui est acceptable et de ce qui ne l'est pas. De la part du client comme du prestataire. Et on le fait savoir. En France, il est de bon ton de tout trouver normal: les places de spectacle à des tarifs immodérés, les restau qui te servent du décongelé à des prix dingues, les fringues... On a du mal à protester publiquement contre les "hold-up" auxquels la distribution nous confronte quotidiennement.  Le snobisme du "quand on fait la fête, on ne regarde pas" est moins répandu en Allemagne, le client conserve le plus souvent son esprit critique.

Les différences culturelles ne s'effaceront pas aussi facilement: le soir, dans les foyers allemands, on mange son "Abendbrot": une tranche de pain avec cornichons, tomates et fromage ou charcuterie. Et puis c'est tout. En France, d'autres traditions (habilement entretenues) poussent à la dépense. Dans ma jeunesse, l'apéro était exceptionnel, puis il est devenu courant le dimanche, les we, pendant les vacances. Désormais quasiment tous les jours... Même chose pour ces plats de fête qui sont désormais des nécessités: huîtres n'importe quand, foie gras, champagne..., sans que la qualité de vie y ait vraiment gagné. Evidemment, pour rendre cela possible, l'éventail de l'offre s'est élargi: les produits Fauchon et ceux d'Ed l'épicier peuvent avoir des appellations semblables en apparence, mais c'est à peu près tout ce qui les rapproche. Les producteurs et les fabricants marrons en profitent pour réaliser des bénéfices jamais atteints. En Allemagne, on est probablement moins "gogo". 

Voilà pourquoi, une discussion sur les salaires est difficile: le Français moyen a certainement besoin de plius d'argent pour vivre que son équivalent allemand et les queues de voitures françaises qui chaque jour passent le Rhin pour aller faire leurs courses l'ont compris.

 Quant à la fameuse productivité (telle que la comprend le système libéral), si vous allez faire un tour en Germanie, comparez par exemple la célérité avec laquelle une caissière de super-marché fait défiler les produits avec les habitudes françaises... Je puis assurer qu'il en va de même avec les artisans! Dans une perspective purement capitaliste, les habitude de travail sont bien différentes de ce qu'elles sont "chez nous", ce qui, à mon avis, n'est pas un avantage...

De toute façon, le système qui mène les deux pays est le même: le but final est le profit maximal. A ce niveau, la place de l'écologie dans les deux pays a valeur de parabole: en Allemagne on cherche à préserver pour que ce système puisse se prolonger le plus longtemps possible et générer ainsi le plus de bénéfices possibles; en France, on se préoccupe encore trop peu d'un demain lointain et on cherche à engranger le maximum le plus rapidement possible. Lorsque le temps de travail global augmente en Allemagne, c'est dans cette perspective capitaliste d'un revenu maximal sur une longue période; en France, les 35 heures et l'augmentation des années de travail forment une cote mal taillée: elles ne satisfont ni le libéralisme pur et dur ni l'aspiration à un autre type de société non plus consommatrice et productiviste à tout crin mais simplement humaine, telle que les auteurs de Travailler deux heures par jour l'avaient défini dans les années 70. Quant aux tristes propositions de Sarko et des siens...

Donc, inutile de comparer la France et l'Allemagne. C'est de ce système fondé sur la double réification des individus (producteurs et consommateurs, le "fordisme moderne") qu'il faut sortir.

8 février 2012

France-Allemagne: énergiquement vôtre

France-Allemagne :  De l’énergie à revendre

 

Plus de 100 000 mégawatts de consommation en France. On frise la surchauffe, l’infarctus énergétique, l’orgasme à haute pression. Le réseau tiendra-t-il ? Pas not’ faut’ ! Le froid sibérien, bien sûr… Tiens, pas de problèmes dans cette agaçante Allemagne dont on nous rebat les oreilles : ils exportent même ! Ce lundi matin 4000 mégawatts, à peu près l’équivalent de 4 centrales atomiques ! Peut-être fait-il moins glacial de l’autre côté du Rhin. Vendredi, tout comme lundi, la consommation totale en germanie (exportations comprises) était de 70 000 mégawatts (les éoliennes ne fournissant que 2000 mais l’énergie solaire - qui joue un  rôle stabilisateur – donnait 10000 MW aux heures de midi !) : soit 7 centrales atomiques !) Inutile de mettre en marche les centrales au charbon de réserve prévues en raison de la sortie progressive du nucléaire. Tout baigne à Berlin.

Pourtant, 80 millions d’Allemands, 60 millions de Français ; une industrie qui pète le feu à l’Est et une industrie moribonde à l’Ouest comme on nous le répète. Difficile à comprendre : comment peut-on avoir besoin de moins d’électricité dans un pays plus peuplé et plus actif sur le plan industriel ? Inutile d’avoir fait l’ENA pour y répondre : notre pseudo indépendance énergétique (scandée avec des trémolos gauliens) est menacée par le tout électrique (par baisse d’un degré, une augmentation de la consommation de 2300 MW !), par un  réseau de transport souvent obsolète (baladez-vous dans les villes, voyez les installations qui courent sur les murs, voyez dans les campagnes l’état de lignes HT), par un  habitat mal isolé (pas isolé du tout comme dans la plupart des HLM !), par des choix politiques aberrants en matière d’énergie.

On nous a aussi rebattu les oreilles avec le prix imbattable du KW nucléaire (en taisant les « faux-frais » : réparation des centrales, mises aux normes, prévisions des coûts de démolition et de stockage des déchets…) mais cette semaine, malgré le froid et la demande, aux heures les plus chères (18-19 h) le KWh livré coûtait 14, 3 cents, voire, 7,3 à la mi-journée en Allemagne.  En France, mardi soir, le KWH coûtait jusqu’à 34 cents alors qu’il ne valait que 12,5 en Allemagne : une consolation, voilà des importations qui se révèlent bon marché (mardi matin la France a importé plus de 5000 mégawatts d’Allemagne, de Belgique, d’Italie, de Suisse, d’Angleterre) !  

Mais peu importe. Nous avons EDF (totalement déficitaire mais nous (l’Etat !) sommes là), le TGV (et ses pannes), Airbus (français ? mais si, mais si !), Areva ( et son exploitation éhontée des ressources d’uranium de pays dits « en voie de développement), Vuitton (qui a délocalisé sa production pour limiter ses frais) et le club tricolore du quatre/quarante ( comme dit mon cousin Marcel ! Allez les Bleus)…

Hollande, lui, il  va continuer dans le nucléaire…

Publicité
Publicité
1 février 2012

De l'Allemagne: quelques mots pour commencer

En France, on ne cesse d'évoquer l'Allemagne et la récente interview du président de la République en a été un exemple particulièrement corsé, puisqu'en moins d'une heure il a cité plus de vingt fois le nom de ce pays, comme si la politique menée Outre-Rhin devait être le seul modèle autorisé, la panacée à toutes les difficultés économiques et sociales que traverse notre pays !

Or, que sait-on de l'Allemagne en France? Guère plus qu'à l'époque de madame de Staël ! Je me souviens d'une dame très bien, appartenant au Quai d'Orsay et venue à Berlin pour y rencontrer les chefs des établissements scolaires français de l'Est de l'Europe. Avant les réunions de travail, il avait été prévu par les services de l’ambassade un tour de Berlin en bus et j'avais eu le privilège d'être assis à côté de cette personne. Nous roulions à travers les larges avenues de la ville et je pensai qu'il serait bien que j'adresse quelques paroles à ma voisine qui semblait se morfondre sur son siège. Manquant d'inspiration, je lui demandai (mais il faut bien se lancer!) si elle avait déjà séjourné à Berlin. Elle me répondit par la négative et ajouta après un long silence que j'hésitai à interrompre: "Je n'aime pas Berlin. C'est moche, c'est lourd. Regardez ces façades, ajouta-t-elle en pointant l'alignement des immeubles de la französische Strasse. Pompeux et pompier. Le caractère allemand en plein." Un peu refroidi par cette impérieuse déclaration qui rappelait les accents du Barrès de Colette Baudoche, je ne me décourageai pourtant pas et, après quelques minutes de silence, j'osai une seconde question: "Et vous étiez souvent en Allemagne?" La dame me jeta un regard excédé et soupira: "Non! Je n'aime pas l'Allemagne et je n'y suis venue que parce que j'y suis contrainte."

Cette personne voyageait avec ses préjugés défavorables et ne voulait rien voir d'autre; le président Sarkozy faisait en sorte de faire croire qu’il admirait la politique allemande, pensant sans doute convaincre ainsi des électeurs putatifs et peu au courant des réalités.

 

En fait, l’Allemagne ne mérite ni excès d’honneur ni indignité.

 

Pour n’en rester qu’à la vie de tous les jours, à l’existence quotidienne de madame et de monsieur Tout-le-Monde, il y a fort à parier que les Français auraient eu du mal à accepter la cure imposée par M. Schroeder avec son agenda 2010 : l’augmentation considérable de l’âge de la retraite, la multiplication des petits boulots, les « jobs à 1 euro (de l’heure) », la prolifération des emplois à 400 euros (20 ou 25 heures par semaine voire plus, ni retenues, ni charges sociales ni impôts),  la différence de salaires entre l’Est et l’Ouest qui fait que, par exemple, une coiffeuse à Leipzig peut devoir se contenter de moins de 4 euros de l’heure, la diminution des allocations chômage, le RMI (Hartz IV) calculé au plus juste quand le gouvernement se bat bec et ongles, recherche le consentement national pour ne pas accorder une augmentation mensuelle de plus de 5 euros à ces gens supposés ne pas travailler, mais qui, pour beaucoup d’entre eux, ne gagnent pas assez pour vivre de leur activité et ne peuvent survivre que grâce à cette allocation chichement calculée… Et puis, quand on dépend de l’aide sociale en Allemagne, on est soumis à quantité de contrôles : a-t-on une voiture ? Est-elle bien nécessaire ? Que dépense-t-on ? Va-t-on au café, au cinéma ?… Non seulement l’aide accordée est maigre, mais il faut encore en justifier l’usage. Des fonctionnaires sont  d’ailleurs chargés d’espionner ces « profiteurs » de la générosité publique afin qu’ils n’abusent pas ; certains vont jusqu’à examiner le fond des poubelles pour témoigner que ces parias vivent comme ils le doivent : pauvrement ! La ministre de la famille s’est fait fort d’obtenir pour les enfants les plus démunis des « chèques éducation » que les familles peuvent monnayer contre des cours supplémentaires, des activités sportives ou culturelles : surtout ne pas donner d’argent aux familles, qui en feraient certainement un mauvais usage ! Il y a quelque temps encore, le propriétaire d’un appartement ou d’une maison ne pouvait prétendre aux aides sociales, à Hartz IV : il devait d’abord être totalement sur la paille !

Environ 15% de la population est officiellement considérée comme pauvre et la pauvreté est comme partout héréditaire… On clame la baisse du chômage mais les agences de l’emploi ne le cachent pas : en 2011 par exemple, 30% au moins des personnes rayées des listes ne l’ont été que parce qu’elles n’ont tout simplement pas renouvelé leur demande, qu’elles ont été considérées comme impossibles à placer (les mères de jeunes enfants par exemple) ou qu’elles ont refusé les offres qu’on leur a faites (au moins 3 !). Ajoutons le nombre certainement important de tous ceux qui se contentent de plusieurs « jobs » à 400 euros, des créateurs de mini- entreprises (1000 euros par mois pendant 6 mois au maximum, mais quasi impossibilité de retourner pointer en cas d’échec), des employés de plus en plus nombreux de firmes de sous-traitance...

Des conditions sociales dures pour les petits, très dures même et que renforcent une médecine en réalité à deux vitesses même si officiellement on refuse de l’envisager : les patients « privés » qui bénéficient de passe-droits et les autres… De nombreux médecins d’ailleurs, mécontents des conditions qui leur sont faites par les caisses maladies (37 euros par « client » et par trimestre quel que soit le nombre de visites) abandonnent d’ailleurs le secteur public et se consacrent uniquement aux privés, ce qui n’améliore pas les choses. Nous parlerons dans une autre communication de l’école.

En même temps, sur beaucoup d’aspects, la vie en Allemagne peut être plus chère qu’en France.

Accepterait-on sans broncher en France que le Kwh d’électricité coûte entre 22 et 24 cent, que la consommation d’eau soit deux fois plus onéreuse, que les assurances automobiles soient doublées, que les voitures diesels payent un impôt bien supérieur à celui des voitures à essence, qu’il soit décidé un beau jour que votre voiture pour des raisons de sauvegarde de l’environnement et de la qualité de l’air soit interdite dans telle ou telle ville, dans telle ou telle région. Verrait-on d’un bon œil que les assurances maladies fassent de plus en plus une place à la responsabilité du malade, aux mesures qu’il prend pour s’assurer une véritable hygiène de vie ? Achèterait-on encore beaucoup de journaux quand le prix de vente est au moins le double de ce qu’il est en France (même si les quotidiens allemands offrent en général un panel d’informations bien plus large que chez nous), payerait-on sans broncher une redevance pour l’audio-visuel deux fois plus élevée ?...

 Mais l’Allemagne, c’est aussi un pays où les loyers sont relativement moins onéreux qu’en France, avec une qualité des constructions généralement meilleure. Les prix de la consommation courante (alimentation, confection…) sont également inférieurs et on peut manger, boire partout à des prix décents. Les transports en commun (assez coûteux) couvrent tout le territoire. C’est un pays où l’on trouve peu de « zones poubelles », de territoires délaissés, de taudis, mais les propriétaires sont contraints à entretenir leurs biens et à respecter certains standards. La solidarité, à travers les organisations privées, les associations est autrement importante que chez nous. La vie culturelle est elle aussi particulièrement développée : pas une ville, pas un village, pas un  endroit où il n’y ait régulièrement de manifestation de qualité… Quant à l’aspect des villes et des campagnes, la dame du Quai d’Orsay aurait dû faire taire ses préjugés et se pencher davantage sur les réalités : il y a quarante-cinquante ans, on voulait faire disparaître (et cela pouvait se comprendre) de Strasbourg les « traces » de l’occupation allemande, ces « affreuses » constructions wilhelmiennes ; aujourd’hui, on désire les classer, les protéger, les présenter comme un des joyaux de la ville ! La lourdeur allemande est un mythe ou plutôt, on ne compte pas plus d’horreurs architecturales en Allemagne qu’en France et on peut même affirmer que les villes sont beaucoup moins défigurées par d’innombrables « zones industrielles » ou commerciales et par les forêts anarchiques de panneaux publicitaires !  

Les citoyens se sentent peut-être davantage concernés par les questions d’environnement, ils sont plus conscients de leur rôle possible et de leurs responsabilités. Le système politique est lui-même plus « démocratique » en ce sens que le Parlement est une instance incontournable et que la chancelière ne peut imposer ce qu’elle veut comme le roi Sarko. En revanche, les députés de la gauche allemande (Linke) sont soumis à un contrôle policier !

 

En fait, des deux côtés du Rhin, deux traditions différentes  se sont développées même si les points communs sont nombreux. Les mentalités, cette résultante dont les composantes sont historiques, religieuses, économiques, géographiques, culturelles divergent

Mon beau-père, qui  ne possédait pas un sou et pas un bien, se contentant d’une maigre retraite pour vivre dans son logement social, lisait chaque samedi les cours de la Bourse et se réjouissait de voir les cours augmenter ou se désespérait quand ils baissaient.  Il se sentait solidaire de ce monde du capital et trouvait tout à fait normal que d’autres gagnent énormément d’argent. En revanche, il aurait été fort en colère de voir que le président de son pays n’ait pas hésité à se mêler à des trafics proches de la malhonnêteté ou de l’abus de pouvoir.  Comme beaucoup d’Allemands, il avait une vision angélique des puissants, persuadé que l’ordre social était le meilleur des mondes. Dans de telles conditions, on est prêt à accepter beaucoup, à endurer tous les sacrifices et toutes les difficultés.  

Il est absurde dans ces conditions de penser qu’on puisse reproduire à l’identique en France ce qui semble fonctionner en Allemagne, d’autant plus que dans ce dernier pays on compte plus de 40 millions de travailleurs et que la France doit tourner autour de 20 millions !

Enfin, dans les deux cas, le même système est à l’œuvre mais il progresse par des chemins différents : réification des individus, consumérisme établi en dogme, le libéralisme érigé en veau d’or. Les nuances, les angles d’approche varient et font croire qu’ici ou là les choses vont mieux, mais ce mieux est relatif.

On ne refera jamais un nouveau monde avec les débris de l’ancien, que ces débris viennent d’un côté ou de l’autre du Rhin, d’un côté ou de l’autre de l’Atlantique, mais la République universelle d’Anacharsis Cloots (un philosophe allemand et français) reste à construire.

Publicité
Publicité
Nouvelles d'Allemagne
  • Comme le Persan de Montesquieu, le "locataire" du Blog, un Français habitant l'Allemagne depuis des années, donnera ses impressions sur le pays où il séjourne. On parle tant de l'Allemagne dans l'hexagone, on colporte tant de fausses vérités !
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Publicité